L'autorisation de mise sur le marché du Sativex, un médicament dérivé du canabis, est en cours pour traiter les douleurs liées aux scléroses en plaques.
Ce sera une grande nouveauté dans la pharmacopée française. Le Sativex, un dérivé du cannabis, devrait bientôt pouvoir être commercialisé. Ce spray buccal disponible dans dix-sept pays européens est notamment destiné à soulager les raideurs musculaires chez les malades atteints de sclérose en plaques.
L'introduction d'un tel médicament marque un changement important dans notre pays. À la demande de Marisol Touraine, la ministre de la Santé, il a d'abord fallu modifier le Code de santé publique qui interdisait jusqu'en juin dernier tout usage du cannabis. Désormais, le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), et seulement lui, peut «octroyer une autorisation de mise sur le marché à des spécialités pharmaceutiques à base de cannabis ou ses dérivés et autoriser les opérations de fabrication, de transport, d'importation, d'exportation, de détention, d'offre, de cession, d'acquisition ou d'emploi relatives à ces spécialités».
Le laboratoire britannique GW Pharmaceuticals, qui fabrique ce produit et qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché dans son pays, a ensuite soumis son dossier ailleurs en Europe et aujourd'hui en France à l'ANSM. La réglementation européenne prévoit en effet qu'un laboratoire peut soit demander une autorisation de mise sur le marché directement à Bruxelles valant pour tous les pays de l'UE, mais cette démarche est lourde et onéreuse, soit le faire dans un seul pays et demander ensuite une extension aux pays voisins sur la base d'accord de réciprocité. C'est donc l'option retenue par GW Pharmaceuticals qui a très logiquement opté pour la Grande-Bretagne comme pays référent.
Prescriptions très ciblées
«Il reste toutefois une étape importante à franchir, rappelle-t-on à l'ANSM, celle concernant les conditions de prescription et de délivrance.» Les experts de l'agence vont en effet décider dans les semaines qui viennent, vraisemblablement d'ici à la fin de l'année, si ce médicament pourra être délivré dans n'importe quelle pharmacie ou sera réservé à l'hôpital, si tous les médecins pourront le prescrire ou seulement les spécialistes…
Faut-il craindre une quelconque addiction? «Le Sativex combine deux principes actifs du cannabis. Le THC, qui est responsable des effets secondaires délétères associés au cannabis: sensation de planer, troubles cognitifs… Et un autre, le cannabidiol qui au contraire atténue cet effet. Quand ils sont en proportions égales, le risque de dépendance diminue fortement», expliquait en mars dernier au Figaro Pier Vincenzo Piazza, directeur d'un centre Inserm responsable de l'équipe de physiopathologie de l'addiction.
De son côté, Isabelle Adenot, la présidente du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, tempère l'idée selon laquelle ce genre de produit est susceptible d'encourager les trafics. «Les prescriptions de ce médicament seront probablement très ciblées», souligne-t-elle avant d'ajouter: «Nous savons gérer ce genre de produits très lourds issus de plantes. Pavot, opium, morphine, on délivre déjà des substances très puissantes contre la douleur.»
Quel que soit le verdict final de l'agence du médicament, il va encore falloir attendre pour se procurer ce médicament qui, selon l'entreprise, «sera au mieux disponible en 2015».