Dimanche, une équipe de virologues américains a annoncé que pour la première fois, un enfant qui avait été contaminé à la naissance par la virus du SIDA, a été guéri. Il avait reçu des antirétroviraux moins de 30 heures après être né.
C'est un véritable espoir pour les millions de personnes infectées dans le monde par le virus du SIDA. Dimanche, à la 20e conférence annuelle sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI) tenue à Atlanta, des scientifiques ont dévoilé des résultats d'une importance majeure dans la lutte contre le VIH. Pour la première fois, ceux-ci sont parvenus à guérir un enfant qui avait été contaminé à la naissance par sa mère séropositive et non traitée.
Pour cela, les médecins lui ont administré des antirétroviraux moins de 30 heures après sa naissance, soit bien plus tôt que ce qui est fait chez les nouveaux-nés présentant un haut risque d'être contaminés. Toutefois, comme l'a souligné l'équipe, la petite Américaine n'est pas complètement guérie. C'est ce qu'on appelle une guérison "fonctionnelle", autrement dit, le virus n'a pas été complètement éradiqué mais il est désormais présent en concentration tellement faible que l'organisme de l'enfant parvient à le contrôler sans avoir besoin des antirétroviraux.
D'après les chercheurs, le fait d'avoir administré très tôt le traitement aurait bloqué la formation de réservoirs viraux qui sont normalement difficiles à traiter par la suite. Ces réservoirs sont en fait des cellules contaminées mais celles-ci sont "dormantes" et ont la capacité de relancer l'infection lorsque le traitement aux antirétroviraux est interrompu, ceci chez la plupart des personnes séropositives.
Un virus devenu indétectable au bout de 29 jours
"Faire une thérapie antirétrovirale chez les nouveau-nés très tôt pourrait permettre d'obtenir une très longue rémission sans antirétroviraux en empêchant la formation de ces réservoirs viraux cachés. C'est un preuve que le VIH pourrait être potentiellement curable chez les enfants", souligne le Dr Deborah Persaud, une virologue du Centre des enfants de la faculté du centre hospitalier universitaire Johns Hopkins à Baltimore citée par l'AFP.
La mère enceinte a découvert qu'elle était infectée par le VIH vers la fin de sa grossesse. Il était donc trop tard pour lui administrer un quelconque traitement pour empêcher le virus d'infecter le foetus. C'est ainsi au vu du risque de contamination que les médecins ont décidé d'agir plus précocement. Moins de 30 heures après la naissance et avant même de savoir si l'enfant était contaminé, ils lui ont administré un cocktail de trois antirétroviraux. Un traitement qu'ils ont maintenu pendant 18 mois tout en surveillant la charge virale du bébé.
Les jours suivants sa naissance, les tests ont montré une diminution progressive de la présence virale dans le sang du nouveau-né jusqu'à ce que le virus devienne indétectable 29 jours après. A l'issue des 18 mois, les médecins ont alors perdu la trace du bébé qui n'a donc reçu aucun traitement durant cette période. Mais aucun des tests sanguins effectués ensuite n'a détecté la présence du VIH. Seules des analyses génétiques ont permis de trouver des traces mais celles-ci étaient insuffisantes pour la réplication du virus.
Une "guérison" excessivement rare
Actuellement, la suppression de la charge virale du VIH sans traitement est excessivement rare. Elle est observée dans moins de 0,5% des adultes infectés, appelé "contrôleurs", dont le système immunitaire empêche la réplication du virus et le rend cliniquement indétectable, ont précisé les virologues. D'après eux, le cas du jeune enfant apparemment guéri pourrait changer la pratique médicale actuelle en mettant en lumière le potentiel d'un traitement antirétroviral très tôt après la naissance pour ces nouveau-nés à haut risque.
Néanmoins, le premier objectif actuel reste tout de même la prévention pour empêcher la transmission de la mère à l'enfant, ont souligné les chercheurs précisant que les traitements antirétroviraux des femmes enceintes permettent actuellement d'éviter de transmettre le virus à l'enfant dans 98% des cas. Toutefois, quelques 300.000 enfants nés séropositifs naissent chaque année dans le monde pour la plupart dans les pays pauvres où seulement 60% des femmes enceintes infectées avec le VIH bénéficient d'un traitement anti-rétroviral.
Des résultats porteurs d'espoir
Aujourd'hui, un seul cas de guérison complète a été répertorié officiellement : celle de l'Américain Timothy Brown, dit le patient de Berlin. Il a été déclaré guéri après une greffe de moelle osseuse d'un donneur présentant une mutation génétique rare empêchant le virus de pénétrer dans les cellules. Mais ceci n'est pas le seul espoir obtenu ces dernières années.
Une étude présentée en juillet à la conférence internationale sur le sida a indiqué que douze patients en France de la "cohorte dite de Visconti" infectés avec le VIH et mis peu après leur infection (8 à 10 semaines) sous antirétroviraux pendant près de trois ans, continuaient à contrôler leur infection six ans après sans traitement.
par Émeline Ferard