Origine, avantages et inconvénients d’un combustible qui suscite la controverse .
moxitude
Le Mox, késaco ?
Avant d’être la pomme de discorde entre écologistes et socialistes, le Mox, de l’anglais mixed oxide, est un combustiblenucléaire à base d’oxyde mixte d’uranium et de plutonium. Il contient entre 5 et 10 % de plutonium et entre 90 et 95 % d’uranium appauvri. À l’origine, le Mox était le combustible des réacteurs à neutrons rapides, du type Superphénix, tous à l’arrêt depuis l’abandon de ce dernier, en 1997, par Lionel Jospin. La technologie qui permet sa fabrication est héritée dunucléaire militaire, puisque la production de plutonium a été lancée, dans les années soixante, pour les besoins de la bombe atomique.
Après l’arrêt de Superphénix, la décision a toutefois été prise en France de l’utiliser dans les réacteurs électronucléaires existants qui fonctionnent normalement avec du combustible à l’uranium enrichi. 21 des 58 réacteurs français fonctionnent actuellement avec un maximum de 30 % de Mox.
Dans cette optique, les combustibles usés des centrales nucléaires sont entreposés, entre 3 et 5 ans, dans des piscines remplies d’eau (le temps que leur radioactivité baisse) avant d’être retraités par l’usine de la Hague dans la Manche. L’opération consiste alors à séparer l’uranium (95 % du total), le plutonium (1 %) des déchets ultimes (4 %). Le plutonium ainsi extrait est alors acheminé vers l’usine Melox de Marcoule, dans le Gard, qui est actuellement la seule au monde à fabriquer du Mox.
Quels sont les avantages de ce combustible ?
Son principal atout est d’offrir un débouché au plutonium issu du retraitement des combustibles effectué à la Hague ainsi qu’à l’uranium appauvri généré par les activités de l’usine d’enrichissement d’uranium du Tricastin, située dans la basse vallée du Rhône. Dans le même temps, il permet d’économiser de l’uranium enrichi et de réduire la quantité de plutonium (généré par les centrales) dans les déchets ultimes. Aux États-Unis et en Russie, le Mox a également été envisagé comme un moyen d’écouler du plutonium militaire devenu encombrant depuis le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires de 1968.
En tant que combustible, Areva affirme que le Mox ne présente cependant pas de qualité particulière : il ne serait ni meilleur ni plus mauvais qu’un autre.
Un avis que ne partage pas totalement Louis Mandicourt, ancien chercheur au CEA, pour qui l’utilisation de Mox dans les réacteurs à eau n’est pas optimale du point de vue de la physique nucléaire. Explications : « Le plutonium a quatre isotopes : Pu-239, Pu-240, Pu-241 et Pu-242. Les réacteurs du type Superphénix fissionnent ces quatre isotopes, tandis que les réacteurs actuels n’en fissionnent que deux (Pu-239 et Pu-241) et … dégradent les autres. Le plutonium-240 donne alors de l’américium, tandis que le plutonium-242 donne du curium. Or, tous deux constituent des déchets hautement actifs dont on ne peut plus rien faire. » Dommage ! Mais, derrière la filière française du Mox se cache aussi l’espoir qu’un jour de nouveaux surgénérateurs de type Superphénix puissent être mis en service…
Pourquoi le Mox est-il aussi décrié ?
« Tout simplement parce que le plutonium – qui n’existe pas dans la nature, mais qui est fabriqué par l’homme – est le corps le plus dangereux que l’on puisse trouver sur Terre », explique Bernard Laponche, ancien ingénieur au CEA désormais membre de l’association Global Chance. « Mettez-en un microgramme dans votre organisme et vous êtes à peu près sûr de développer un cancer. » « Ainsi, un combustible Mox avant utilisation est-il un million de fois plus radioactif qu’un combustible à l’uranium », affirme le scientifique. De ce simple fait, il implique donc des précautions d’usage renforcées et des risques plus importants. « Étant beaucoup plus radioactif et aussi beaucoup plus chaud, il pose même des tas de problèmes de gestion dans les centrales, notamment de chargement dans les réacteurs », souligne Bernard Laponche.
Une fois usé, le Mox doit également refroidir dans les piscines beaucoup plus longtemps qu’un combustible classique. Et in fine, il ne peut plus être retraité et doit donc être stocké. « Au total, il n’aura permis de réduire que d’environ 15 % la quantité de plutonium produite initialement », précise Bernard Laponche.
En outre, Greenpeace France souligne que la production de Mox engendre un dangereux transit de plutonium sur les routes de l’Hexagone, sans compter les rejets radioactifs atmosphériques et maritimes qui résultent du retraitement des combustibles usagés effectué à la Hague. Enfin, le Mox est soupçonné d’induire un risque de prolifération, l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) l’ayant elle-même classé dans la catégorie des matières fissiles utilisables à des fins militaires.
Combien la filière Mox représente-t-elle d’emplois ?
L’usine Melox d’Areva qui fabrique ce combustible emploie environ 1 300 personnes. Toutefois, les 5 000 salariés du centre de retraitement de la Hague sont également, au moins en partie, dépendants de la production de Mox.
Le Mox est-il un combustible du futur ?
Pour l’heure, force est de constater qu’il ne suscite pas d’engouement à l’échelle de la planète. Actuellement, seuls 10 % des réacteurs nucléaires utilisent ce combustible dont la moitié se trouvent en France… Areva espère convaincre d’autres pays d’opter pour le retraitement des déchets ainsi que certains futurs acquéreurs de l’EPR qui peut éventuellement fonctionner avec 100 % de Mox. L’entreprise déclare avoir à ce jour quatre clients à qui elle fournit du Mox : l’Allemagne, la Belgique, la Suisse et le Japon.
Quelques doutes subsistent pourtant sur les bénéfices que l’entreprise pourra tirer, à terme, de cette technologie. D’abord, parce que, parmi les actuels clients, l’Allemagne, la Belgique et la Suisse ont récemment décidé de sortir du nucléaire, respectivement en 2022, 2025 et 2034. Quant au Japon, il est aussi en proie à de sérieux doutes depuis l’accident de la centrale de Fukushima. Concernant l’EPR, la Finlande, premier client, n’a pas fait le choix du Mox.
Il y a peut-être une raison simple à cela… Car, selon Bernard Laponche, compte tenu des cours actuels de l’uranium, l’opération n’est tout bonnement pas rentable… « Le retraitement des combustibles irradiés pour faire du Mox est plus coûteux que son stockage. »
Source : Le Point
Utilisation en France
En 2011, l’usine Mélox du site nucléaire de Marcoule dans le Gard produisait 140 tonnes de MOX par an.
Sur l’ensemble du parc français, EDF utilise le mélange MOX depuis les années 1990 pour 2013 réacteurs nucléaires à eau pressurisée (REP, ou PWR en anglais) d’une puissance de 900 MW. Il s’agit de :
2 réacteurs à la centrale nucléaire de Saint-Laurent
4 réacteurs à la centrale nucléaire de Gravelines
4 réacteurs à la centrale nucléaire de Dampierre
2 réacteurs à la centrale nucléaire du Blayais
4 réacteurs au site nucléaire du Tricastin
4 réacteurs à la centrale nucléaire de Chinon.
Source : Wipikédia
La radioactivité du Mox
Un combustible usé qui met plus de temps à refroidir
Les combustibles à base de MOX sont beaucoup plus radioactifs que ceux à base d’uranium enrichi, aussi bien à l’état neuf qu’après leur irradiation en réacteur.
Dans le cas du combustible neuf, la radioactivité accrue est due à la présence des isotopes du plutonium dont les périodes s’échelonnent entre 14 ans et 370 000 ans, alors que celles de l’uranium-238 et de l’uranium-235 sont de 700 millions et 4.5 milliards d’années. La radioactivité varie en raison des périodes. Ceci explique que l’on puisse manipuler l’uranium pratiquement à mains nues alors que les pastilles de MOX contenant du plutonium sont un million de fois plus radioactives.
La fabrication, le conditionnement du MOX nécessitent en conséquence des mesures de protection strictes. Il en va de même pour les transports, les chargements et déchargements qui nécessitent des « châteaux » spécialisés. Des boîtes à gants suffisent pour la fabrication, les isotopes du plutonium émettant des rayons alpha peu pénétrants.
La comparaison de l'évolution au cours du temps du dégagement thermique des combustibles irradiés montre que le MOX dégage de 2 à 7 fois plus de chaleur que les combustibles classiques à base d'uranium (UOX). C'est ainsi qu'il faut atteindre environ 50 ans pour que le dégagement de chaleur atteigne celui du combustible à l'uranium au bout de 5 ans, délai requis par le retraitement. On remarquera la part accrue des isotopes du plutonium et d'actinides comme l'américium et le curium. (Source CNE).
La comparaison de l’évolution au cours du temps du dégagement thermique des combustibles irradiés montre que le MOX dégage de 2 à 7 fois plus de chaleur que les combustibles classiques à base d’uranium (UOX). C’est ainsi qu’il faut atteindre environ 50 ans pour que le dégagement de chaleur atteigne celui du combustible à l’uranium au bout de 5 ans, délai requis par le retraitement. On remarquera la part accrue des isotopes du plutonium et d’actinides comme l’américium et le curium. (Source CNE).
Un dégagement de chaleur accru
Après un passage en réacteur, le MOX dégage plus de radioactivité et de chaleur que le combustible classique. La radioactivité provenant surtout du passage en réacteur, la différence est cependant moins marquée que pour les combustibles neufs. Ce dégagement de chaleur plus important pourrait expliquer pourquoi le réacteur N°3 a été plus endommagé que les autres lors de l’accident de Fukushima dû à un arrêt du refroidissement.
Les assemblages de MOX irradiés contiennent plus de deux fois plus d’actinides que les assemblages classiques. Les proportions des américium-241 et 242 sont notamment multipliées par 4 et celle du curium-244 par près de 10. Ces actinides à durée de vie relativement courte sont très radioactifs (la période du curium-244 n’est que 18 ans).
Au total, la radiotoxicité est multipliée de 5 à 7 fois par rapport aux combustibles à l’uranium. Pour atteindre le niveau d’activité des combustibles conventionnels au moment de leur retraitement, le MOX mettrait environ 50 ans au lieu de 5 à 8 ans.
Cette radioactivité, ces longs délais et la dégradation de la qualité du plutonium expliquent pourquoi les premiers assemblages irradiés de MOX sortis de réacteurs n’ont pas été retraités et qu’il n’est pas envisagé actuellement de le faire. Un multirecyclage en REP serait théoriquement possible, mais ce sont surtout des réacteurs à neutrons rapides ou hybrides qui sont capables de brûler le plutonium et les actinides. On étudie également d’autres assemblages et configurations de combustibles.
Source : La radioactivité