Le ministre du Redressement productif l’a répété : la fracturation hydraulique est aujourd’hui condamnée, mais le dossier de l’exploration des hydrocarbures de roche-mère dans nos frontières n’est pas refermé.
Pro-nucléaire fort peu apprécié des écologistes et des ONG de protection de l’environnement, Arnaud Montebourg pourrait aussi finir par se faire des ennemis dans les rangs du PS. Les adeptes de la cohésion gouvernementale à tout prix et autres partisans de concessions envers EELV (Europe Ecologie-Les Verts) au nom de la stabilité ont en tout cas matière à lui reprocher certaines sorties au minimum malencontreuses.
La plus retentissante d’entre elles, dans le courant de l’été, a eu trait à l’atome civil, que le « monsieur démondialisation » de la primaire socialiste considère comme une « filière d’avenir ». Les responsables d’EELV, à l’exception notable de la ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement Cécile Duflot et de son collègue délégué au Développement Pascal Canfin, tous deux contraints par la solidarité gouvernementale, fusse-t-elle de façade, en sont tombés de leur chaise. Quelques semaines plus tôt, ils s’étaient déjà insurgés contre ses propos sur les gaz de schiste, dossier ultra-sensible s’il en est, mais que M. Montebourg refuse d’enterrer.
La Conférence environnementale a, on l’a évoqué, été l’occasion pour le chef de l’Etat de s’exprimer sur la question. Ce dernier s’est montré catégorique : « Dans l’état actuel de nos connaissances, personne ne peut affirmer que (l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels) par fracturation hydraulique […] est exempte de risques lourds pour la santé et l’environnement ». De fait, l’Élysée a demandé à la ministre de l’Ecologie Batho de « prononcer sans attendre le rejet de sept demandes de permis déposés auprès de l’État ». Ainsi le successeur de Nicolas Sarkozy, sans pour autant condamner d’avance les éventuelles alternatives, ne souhaite-t-il pas revenir sur la loi Jacob, qui n’interdit « que » la fracturation hydraulique depuis l’année dernière et à laquelle les socialistes s’étaient opposés… précisément parce qu’elle laisse encore la porte ouverte à d’autres méthodes d’extraction !
« Je préfère que l’énergie durable vienne se substituer aux énergies fossiles, et pas au nucléaire »
Plus que l’inflexibilité de François Hollande sur la fracturation hydraulique, c’est manifestement sa non-interdiction formelle de l’exploration et de l’exploitation des gaz de schiste que M. Montebourg a retenu en priorité… et sans doute apprécié. Interrogé par nos confrères du Monde, le ministre du Redressement productif, un poste-clef dans le gouvernement Ayrault, a en effet considéré que « si la recherche évolue sur cette technique, il sera bien temps d’en reparler », avant de décrypter à sa manière la stratégie nucléaire de M. Hollande.
L’annonce ou plutôt la confirmation de la fermeture de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), tout comme celle de la réduction de la part de l’atome civil dans le panache énergétique français de 75 à 50 % à l’horizon 2025, ne signifient pas que « le nucléaire est abandonné ». « Il s’agit plutôt de rééquilibrer la place de l’atome dans le mix énergétique », a estimé le ministre, qui a évoqué la construction du réacteur EPR de Flamanville (Manche) et « l’exportation de cette technologie à l’étranger ».
« Pour ma part, je préfère que (l’énergie durable vienne) se substituer aux énergies fossiles fort émettrices de gaz carbonique, et pas au nucléaire », a-t-il insisté. Et de juger « irréaliste de vouloir diminuer le nucléaire et le pétrole tout en trouvant de l’argent pour financer les (énergies) renouvelables ». Cette fois encore, la direction d’EELV appréciera…
Reste le débat sur la transition énergétique, qui sera aux yeux de M. Montebourg « une opération vérité sur le coût des énergies vertes ». « Les Allemands ont du mal à les financer et les Espagnols s’y sont endettés à hauteur de vingt-cinq milliards d’euros », a-t-il souligné, tout en plaidant pour une dérèglementation du service public de l’électricité et pour la création d’une communauté européenne de l’énergie durable semblable à ce que fut la défunte CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier). Cet organisme serait « financé avec de la dette » déconnectée des critères de Maastricht.
Les écologistes ne pourront pas dire que le ministre du Redressement productif n’a que des mauvaises idées…
