À la veille du premier anniversaire de l’apparition du Sars-CoV-2, le moins qu’on puisse dire est que ce virus a engendré un imbroglio médiatique et politique inédit. Origine du virus, composition et rôles des conseils scientifiques, influences de l’OMS et des laboratoires pharmaceutiques, contradictions et conséquences des décisions politiques, bilan humain et économique, vaccination à venir, il n’est pas un sujet lié à cette épidémie qui ne fasse l’objet de contestation, et pas seulement en France. Ainsi, de l’autre côté de la Manche, le rédacteur en chef de la prestigieuse revueThe British Medical Journal (BJM) s’est fendu d’un éditorial qui ne fait pas dans la nuance : « quand la bonne science est supprimée par le complexe médico-politique, les gens meurent », écrit-il.
Kamran Abbasi ‒ par ailleurs médecin et professeur auDepartment of Primary Care and Public Health de l’ Imperial College de Londres ‒ pointe le détournement de la science à des fins politiques et financières. Le Covid-19 aurait, selon lui, fait l’objet d’une malversation opportuniste au détriment de la santé publique , impliquant les politiciens, l’industrie et les experts, y compris des scientifiques, au sein d’une corruption à grande échelle.
Le Dr Abbasi fait référence à divers travaux et auteurs pour étayer sa position, et cite quelques exemples nationaux plaidant, à ses yeux, pour son propos :
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La composition, les recherches et les délibérations du conseil scientifique britannique, nommé SAGE (scientific advisory group for emergencies), sont restées secrètes avant qu’une fuite dans la presse ne révèle que les professionnels de santé étaient sous-représentés par rapport aux conseillers politiques.
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La publication d’un rapport sur les inégalités face au Covid-19, notamment celles concernant les minorités ethniques, aurait fait l’objet d’obstruction par les autorités pour « contexte politique difficile » .
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Le BJM a publié une étude qui constate que le test antigénique acheté par le gouvernement pour tester la population à grande échelle n’était en réalitépas aussi performant qu’annoncé par son fabricant. Public Health England (une agence du département de la Santé, équivalent de notre ministère du même nom) aurait tenté, sans succès, de bloquer cette publication.
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Aux États-Unis aussi, des intérêts privés auraient interféré dans les décisions de la Food and Drug Administration d’autoriser ou d’interdire des traitements comme l’hydroxychloroquine ou le remdésivir.
On pourrait ajouter que ce ne fut guère plus clair en France avec ces deux seuls exemples : l’interdiction de l’hydroxychloroquine dès le lendemain de la publication du fameux article frauduleux du Lancet en mai, et l’achat massif par l’État (et l’Union européenne) de doses du remdésivir en octobre, sur la seule foi des affirmations de son fabricant et à rebours des conclusions des premières études… qui conduiront l’OMS, peu de temps après, à désapprouver son usage contre le coronavirus (pour mieux comprendre la « très vilaine histoire du remdésivir », vous pouvez regarder cette vidéo explicative de l'IHU Méditerranée-Infection).
Le Dr Abbasi déplore l’intrication entre la politique et des intérêts privés, et personnels, incompatibles avec l’intérêt général en matière de santé ; « la science ne doit pas être suivie aveuglément, elle doit être considérée de façon équitable. Occulter une partie de la science ou la mettre en avant de façon parcellaire et orientée, ou encore bâillonner certains scientifiques, tout cela met la santé publique en danger , engendre des décès en exposant la population à des mesures risquées ou inefficaces, et la privant des mesures adéquates ».
En France, aucun média n’a relayé cette publication en date du 13 novembre dernier. Aucun journal, ni médical ni généraliste, n’a d’ailleurs jugé utile de seulement s’interroger, sur la base d’un diagnostic analogue à celui du Dr Abbasi, quant à une éventuelle instrumentalisation de la science dans l’Hexagone…
Source
« Covid-19 : politicisation, "corruption", and suppression of science », The British Medical Journal, 13 novembre 2020.