L’évacuation de la «zone à défendre» de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) a débuté ce lundi matin. Elle était annoncée mais ses habitants ont malgré tout été surpris dans leur sommeil : alors qu’ils s’attendaient à des expulsions à 6 heures du matin, l’heure légale, les premières barricades et épaves de voitures ont été éjectées dès 3 heures.
La plupart des journalistes en ont aussi été pour leurs frais : après avoir été bloqués à l’entrée sud de la ZAD, une trentaine d’entre eux se sont aventurés dans les bois et les champs, par nuit noire, à la lumière de lampes frontales et des projecteurs de leurs caméras, pour entrapercevoir la D281… Peine perdue : au bout d’une heure et demie de marche, alors qu’ils touchaient au but, ils ont été reconduits sous escorte policière jusqu’à leur point de départ. Télés et photographes ont néanmoins pu prendre au passage quelques furtives images, la gendarmerie leur promettant de leur fournir les siennes. Les journalistes ont aussi pu croiser, à 6 heures pétantes, l’arrivée de la préfète de Loire-Atlantique et de son directeur de cabinet. Mais ce sera à peu près tout : les petits malins qui ont voulu tenter leur chance par d’autres chemins de traverse ont connu le même sort, des gendarmes bloquant les entrées de tous les chemins donnant sur la D281.Gaz lacrymogènes
Pendant ce temps-là, au «Point info» de la Rolandière, pas d’effervescence particulière, en revanche : ses occupants écoutent Radio Klaxon, la radio qui pirate les ondes du 107.7 FM de la radio autoroutière du groupe Vinci, qui alterne flashs info sur l’avancée des gendarmes mobiles et musique jazzy. La tension monte finalement d’un cran, vers 7h30, peu après les premiers jets de projectiles sur les forces de l’ordre aux «Fosses noires», un des hauts lieux de la ZAD. Alors que le brouillard se lève sur la zone, celui des gaz lacrymogènes s’abat sur les zadistes. La situation est explosive, dans tous les sens du terme : des épaves remplies de bois sont prêtes à s’enflammer, aux côtés de bidons de carburant. «Et après, ils disent que c’est nous les terroristes, soliloque un zadiste, qui se passe du sérum physiologique sur les yeux. Ils ont de la chance que je n’ai pas de Kalach'…» Sa seule arme, c’est un bouclier artisanal floqué du Z de ZAD. Un peu plus loin, d’autres amassent des cailloux dans des seaux et des brouettes.
Reste que les tirs des gendarmes font leur effet : à 8h41, Radio Klaxon lance un «appel aux soutiens» pour affluer sur la Grée, menacée par l’avancée des forces de l’ordre. Un «appel»similaire est lancé cette fois-ci à l’attention «des journalistes», pour venir relayer la situation. Quatre minutes plus tard, un autre lieu-dit, les Vraies Rouges (voisines des Fosses noires) «résiste» et «attend la venue des huissiers», complète la radio pirate. Sur les coups de 9 heures, «toute la D281» est contrôlée par les gendarmes, annonce Radio Klaxon. Le lieu-dit «Jessy James» a lui été «massacré». Pour enchaîner après le flash info, fini le jazz : place à Sound of da Police, le remix de Cut Killer où beaucoup entendent «assassins de la police», et à Sacrifice de poulet, du Ministère A.M.E.R.